GLENROTHES
Lorsque l’on se penche sérieusement sur l’histoire d’une maison de whisky, on peut banalement faire la liste des dates qui ont jalonné une procession d’aléas et de trouvailles miraculeuses au profit d’un savoir-faire séculaire. On peut aussi scruter chaque particularité des cuvées produites afin d’identifier la philosophie qui se cache dans les barriques de vieillissement. On peut également s’intéresser aux destins des hommes et des femmes qui ont fait la légende de la distillerie. Mais il est une manière de débuter le récit du destin d’une maison de whisky qui n’est pas courant et qui consiste à faire un pas de côté. Ce pas de côté, c’est une façon amusante d’introduire un sujet afin de préparer la suite, qui sera plus traditionnelle, car, tout de même, l’objectif est de parler de whisky…
Un pas de côté...
La distillerie Glenrothes a été construite en 1878 dans le village de Rothes. Or, il existe en Écosse une ville qui s’appelle Glenrothes et qui n’a rien à voir avec la marque de whisky du même nom. Pourquoi ? Parce que le terrain sur lequel fut bâtie la ville (destinée à loger des familles de mineurs) appartenait en grande partie au Comte de Rothes. L’administration ajouta donc le terme de Glen (qui signifie vallée) à Rothes pour éviter la confusion avec une ville d’Écosse plus ancienne du nom de Rothes… Celle où fut bâtie la distillerie qui produit encore aujourd’hui le whisky Glenrothes. Il fallait y penser… Appeler une ville différemment d’un village, alors que dans ce village on produit un whisky qui porte le nom de la ville. Ce pas de côté mérite bien un verre de whisky, non ?
Un whisky millésimé ?
Longtemps, et c’est ce qui en faisait sa particularité, Glenrothes millésimait ses cuvées. C’est-à-dire que, plutôt que de mentionner la durée de vieillissement sur ses étiquettes, Glenrothes y inscrivait l’année d’élaboration. Si les bouteilles Glenrothes ne sont plus millésimées, c’est pour une bonne raison. Une raison qui va nous permettre de vous rappeler qu’en matière de whisky, comme pour le rhum, ce n’est pas l’année qui compte, mais la durée…
En effet, si vous lisez une année sur une étiquette de bouteille de vin, l’information est très claire : il s’agit de l’année de récolte du raisin. Un vin de Bourgogne millésimé 2020 est donc le résultat de la vinification, de l’élevage et de la mise en bouteille d’un jus obtenu à partir de la presse de raisins vendangés en 2020. Or, sur les bouteilles de Glenrothes, la confusion était réelle. L’année inscrite ne mentionnait pas la date de récolte de l’orge, ni celle de la mise en barrique des jus distillés, mais celle de l’année de distillation. Et c’est là que le problème débute : car, à la différence du vin, les alcools tels que le whisky ou le rhum, une fois mis en bouteille, n’évoluent plus. C’est-à-dire qu’à la différence du vin, le breuvage à l’issue de son élevage en barriques ne verra pas, ou si peu, sa palette aromatique changer. C’est donc parce qu’il est plus important de savoir pendant combien d’années un whisky a été élevé en barrique, que de connaître sa date d’élaboration, que Glenrothes ne millésime plus ses cuvées.
Un single malt Glenrothes, mais plusieurs cuvées
La réputation de Glenrothes en matière de qualité de single malt n’est plus à faire. Depuis 1879, la distillerie est connue pour avoir adopté un procédé de distillation basé sur une extraction lente des arômes. Cette technique “peu rentable“ permet d’obtenir des distillats de caractère, mais à la suavité préservée. Si la base des whiskies Glenrothes est identique, c’est lors du processus d’élevage que chaque cuvée va peaufiner sa personnalité. Les barriques étant souvent d’anciens fûts de bourbon, la durée de vieillissement va permettre de proposer des whiskies de 12 ans d’âge, de 18 ans d’âge ou de 25 ans d’âge.