Don Papa

Au royaume des rhums, le pire côtoie le meilleur, et les anciens font bonne figure face aux petits nouveaux. Pour évoquer le cas de Don Papa, on pourrait dire qu’il s’agit d’un petit nouveau capable du meilleur… Créé il y a vingt ans aux Philippines, les rhums conçus par Stephen Carroll n’ont rien à envier aux meilleurs, même si l’on ressent bien un certain complexe à ne pas pouvoir revendiquer un passé glorieux. La maison ne cesse d’insister sur la situation exceptionnelle de la canne à sucre utilisée pour produire la mélasse qui sera distillée. Dire que les rhums sont créés sur les contreforts du volcan Kanlaon peut faire rêver, mais est-ce la vraie raison du succès de Don Papa ? Insister sur l’origine du nom, qui fait référence à un révolutionnaire du 19e siècle, l’un de ceux qui s’opposa à la colonisation espagnole puis américaine, permettrait donc aux rhums Don Papa d’être meilleurs ? On en doute. Ce n’est pas en s’inventant un passé que l’on peut justifier une existence, mais en assumant ce que l’on est. Alors, et pour ne pas tomber dans le panneau du marketing parfait de la maison Don Papa, on préfère vous dire la vérité. Ce n’est pas parce que Don Papa a mis le portrait supposé de Dionisio Magbuelas, l’ancien contremaître d’une plantation de canne à sucre devenu révolutionnaire, sur ses étiquettes que ses rhums méritent le détour, mais tout simplement parce qu’ils sont excellents.

Un homme derrière Don Papa

Si la distillerie Bago, qui produit les rhum Don Papa existe depuis 1902, ce n’est pas le cas des premières bouteilles à l’effigie de Dionisio Magbuelas. En effet, c’est seulement en 2012 que Stephen Carroll se décide à lancer une nouvelle marque de rhum après plusieurs années passées au sein de prestigieuses maisons, telles que Johnny Walker ou Rémy Cointreau. L’homme s’est fait connaître pour son sens du marketing et de la communication, et cela va lui servir pour la suite…

C’est lors d’un séjour aux Philippines qu’il tombe sous le charme de celle que l’on nomme “ l’île au sucre “, en raison de ses plantations de canne à sucre. L’idée de produire un rhum sur place le tente, mais il n’est pas encore décidé. Plus tard, Le hasard le mène à faire la connaissance d’un homme qui vient d’hériter de quelques hectares de terre aux Philippines… À croire que la main invisible du destin faisait tout pour inciter Stephen Carroll à relancer la production de rhums, qui avait connu son apogée au temps du protectorat américain avant de s’effondrer au moment de la prohibition.

Don Papa, une histoire rencontre

Une fois convaincu qu’il inventerait sur l’île au sucre un rhum d’un genre nouveau, Stephen Carroll se met en chasse de partenaires. Il rencontre d’abord un vieux prêtre qui possède une maison à la vue imprenable et qui lui raconte l’histoire de sa terre, devenue si fertile grâce au volcan du mont Kanlaon. Puis, il fait la connaissance d’anciens planteurs de canne à sucre qui lui présentent les patrons de la brasserie San Miguel qui gèrent une distillerie sur l’île. C’est avec eux que Stephen Carroll va travailler à l’élaboration des futurs jus Don Papa.

Le rhum qui a révolutionné le rhum

Stephen Carroll tenait à ce que tout soit produit sur l’île, de la canne à sucre au vieillissement, en passant par la production du distillat de mélasse. Car c’est un détail important à préciser, et qui donne leur personnalité aux rhums Don Papa, le choix de distiller de la mélasse et non du jus de canne à sucre étant destiné à proposer des alcools aux arômes puissants et à la bouche volubile… Stephen Carroll voulait faire un rhum pour le grand public, en ciblant une clientèle plus jeune que les habituels consommateurs de rhums vieillis. C’est d’ailleurs grâce à Don Papa que le rhum a réussi à supplanter le whisky dans le palais des consommateurs français. Avant Don Papa, jamais les revendeurs de spiritueux ne proposaient autant de choix de rhums. Lancé en 2013 sur le marché français, Stephen Carroll espérait vendre 10 000 bouteilles… Ce sont aujourd’hui plus de 1 500 000 flacons de Don Papa qui sont consommés chez nous chaque année… Un plébiscite qui permet à Don Papa de créer des cuvées originales, telle que le rhum Don Papa Gayuma qui rend hommage au Mont Kanlaon, le volcan encore actif de l’île au sucre.